Power Pop : Introduction

Power Pop : Introduction

Comme souvent avec les genres musicaux, mais peut-être plus que certains autres, la power pop est délicate à catégoriser. Pour ceux de ma génération la première rencontre a lieu dans les années 1990 avec les guitares crunchy et les mélodies addictives de Weezer ou des Wannadies. Mais le genre remonte certainement à bien plus loin : les Beatles, ou plutôt le vide qu’a laissé leur séparation en 1970, semblent marquer une date de naissance et une orientation stylistique qui font unanimité. On a pu parfois dire (au prix d’une simplifcation assumée) que la power pop, c’est la continuation des Beatles de Rubber Soul et Revolver, de Fab Four qui n’auraient pas découvert les drogues psychédéliques et rencontré Ravi Shankar. Plus clairement : mélodies éclatantes, chœurs pop, et guitares rock.

Christophe Brault pose en tout cas cette définition dans son livre Power Pop, mélodie, chœurs et rock’n’roll, publié par Le Mot et le Reste en 2019. J’ai lu plusieurs ouvrages de cette collection, qui suivent un même schéma : définir un genre musical et son histoire en introduction, puis présenter 100 albums qui apparaissent représentatifs de celle-ci. Des autres opus je conserve au maximum, après que le temps ait fait son œuvre, une dizaine de disques dans ma « bibliothèque » musicale virtuelle. Du jour où j’ai commencé à explorer le livre de Christophe Brault, j’ai enrichi celle-ci d’une cinquantaine de références pérennes, et la liste ne cesse de s’enrichir. La sélection est splendide et d’excellent goût, les explications érudites et modestes. J’ai adoré plonger dans ce livre, qui m’a confirmé que j’adore cette musique, dont chaque époque apporte son lot de pépites.

La power pop n’a pas cessé d’évoluer, et peu de groupes qui s’en revendiquent de nos jours pourraient passer pour des pasticheurs des Beatles. Le son des guitares notamment s’est alourdi avec l’arrivée de possibilités techniques nouvelles. A partir des années 1990, on compte deux approches, nullement exclusives l’une à l’autre : les guitares « jangle », carillonnantes et fidèles à une certaine idée du style 60s (souvent en 12 cordes) d’un côté, et un son « fuzz » riche en harmoniques et idéal pour les « power chords » (accords sans tierce, et donc perçus comme majeurs mais sans caractère net, plaqués avec énergie). Bien des artistes combinent les deux.

S’il y a un fait constant dans l’évolution de la power pop depuis 50 ans, c’est qu’elle n’a jamais rencontré un succès massif et durable. Une relative popularité à l’articulation des années 70s et 80s dans le monde anglo-saxon (Cheap Trick, The Knack, The Quick) semble être le pic de la prospérité commerciale du genre. Auparavant il ne faisait pas le poids face au rock progressif (trop pop) et au hard rock (pas assez macho). Aujourd’hui c’est une niche, alimentée par tout un tas de groupes du monde entier, géniaux mais méconnus (Royaume-Uni, Nouvelle-Zélande et surtout Scandinavie tiennent aisément tête aux inévitables américains). S’il faut tenter d’expliquer cette discrétion, elle provient peut-être de refus d’un sérieux ostensible, ou plutôt du recentrage induit par le fait de prendre la mélodie vocale au sérieux sans sacrifier les fondamentaux du rock’n’roll (à l’inverse, peut-être, de la pop tout court, absolument amnésique et technophile). Ainsi le morceau le plus caractéristique de tout le genre power pop est pour moi le My Sharona de The Knack, dont le solo de guitare est un chef-d’œuvre qui n’a rien à envier à tout le reste du rock et du metal, ni en durée, ni en virtuosité, ni en musicalité, ni en boombasticité. Pourtant Berton Averre, son auteur, reste largement inconnu (y compris chez les guitaristes pour qui cette notion de virtuosité a encore de l’importance en 2021).

Je vous proposerai dans les jours qui viennent trois playlists qui couvrent, de façon à peu près chronologique, l’histoire de la power pop, avec ses grands moments et mes morceaux préférés. J’avais très envie de partager avec vous ces titres, qui me semblent géniaux et qui sont, à de rares exceptions près, trop méconnus. Je suis redevable au livre de Christophe Brault pour la découverte d’un grand nombre des artistes présents sur ces playlists.

Les 3 playlists :
1. Prime Pop Perfectionists, 1967-1980
2. Modern Melody Masters, 1980-2002
3. Fabulous Fuzz Fanatics, 2002-2020

Les commentaires sont clos.