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Author: manur

Dans sa plus belle chanson, Le Forestier était tombé « amoureux de tout un pensionnat » de jeunes demoiselles lisant Audiberti. Aujourd’hui, une ribambelle d’associations familiales ou féministes lui tomberait dessus, mais c’était une autre époque.
Dans cette perspective légaliste et ségoléno-royaliste, j’ai été plus prudent et je suis tombé amoureux d’un complet service d’infirmières, majeures et vaccinées. Ah, mesdemoiselles, mon cœur se serre chaque fois que je pense à vous toutes, qui n’êtes séparées de moi que par un fleuve ridicule et un Ministère des Finances. Une sorte de curieux Syndrome de Stockholm, pourrait-on dire, si j’avais peur des piqûres…

Dans leur numéro 543, sorti en théorie hier (mais en réalité, du moins à Paris, aujourd’hui), les Inrockuptiques proposent un excellent dossier malheureusement intitulé « Les 50 meilleurs blogs ». Pour commencer, nous sommes d’accord, ce qualificatif prétentieux est grotesque.

MAIS Chryde a pas mal travaillé sur ces huit pages, et je peux vous assurer que la sélection est excellente (engadget, tourgueniev, boingboing, said the gramophone, david byrne, 404brain, lisa mandel, eolas…) et que les commentaires qui accompagnent chaque blog mis en valeur sont fréquemment remarquables. (Oui, je viens de dire du bien des Inrocks. Une fois n’est pas coutume.)

Et puis dans un brillant encadré, Chryde a tenté de situer l’état d’esprit de son weblog après cinq ans d’activité. Je m’y retrouve tellement que je ne peux m’empêcher de citer un gros passage :

Aujourd’hui ce genre [de blog] cherche sa place dans un monde presque trop riche pour lui. Il est entré dans une routine mortifère, comme si sa recette d’origine, une dissolution discrète de ma petite personne et de ma petite vie dans des écrits spontanés et volatils, était aujourd’hui devenue la formule de son poison.
Qui veut d’un blog qui parle de tout et de rien alors que se créent chaque jour des blogs spécialisés dans tout ? Que puis-je me permettre d’écrire alors que ma mère le suit et qu’il déborde quelques fois sur mon boulot ? Puis-je m’autoriser à n’avoir rien à dire sur le CPE qui vaille le coup d’être dit là ? Quelle posture adopter alors qu’on attend aujourd’hui de moi de correspondre à une image ?

Moi aussi, je n’avais rien à dire et pas vraiment d’avis pertinent concernant le CPE aux débuts, mais (mon voisin de chambre à l’hôpital ayant la garde de la télécommande) trois semaines de JT de 20h de TF1 imposé m’ont rendu farouchement anti. Je savais la chaîne proche du gouvernement, évidemment, mais j’ai été impressionné par l’absence toute berlusconienne de subtilité dans le déploiement de propagande et dans les choix sémantiques et éditoriaux.

Et puis aussi, c’est merveilleux de revoir Roses ou Via en live, comme ça, après toutes ces émotions, décibels et projecteurs, vous pouvez pas savoir. Mauro est presque aussi divinement charismatique que Tom, en plus. Enfin, à sa manière plus distante.

Demain, on parle de Judas. En attendant, écoutez le Spinto Band. Oh yeah.

Bomb the blogosphere

Bomb the blogosphere

Extract from Questionable Content strip #604 - (c) Jeph Jacques 2003-2006Je suis de retour à la maison depuis deux semaines, et je trouve peu de motivation à relancer ce weblog. Ce qui m’apparaissait comme une grande agora de partage il y a six ans (une naïveté bien tarte-aux-fleurs, je l’admets, mais à l’hôpital j’ai bien réalisé à titre de réeducation fine et non sans fierté un cache-pot en macramé), un espace de potlach donc, pour parler comme Marcel & Guy-Ernie, ne s’est révélé être aujourd’hui qu’un vaste exercice égotiste, un manuel de self-marketing à l’usage des jeunes générations, pour parler comme Raoul. La forme contient évidemment dès l’origine sa part inévitable de mise en scène, mais un peu de distance et d’ironie n’ont jamais tué personne. C’était bien la peine de se gausser autant de la grosse tête de l’autre Belge-d’Or, si l’on a laissé Max, Nick, Le Meur, Gloagen et Ginisty devenir les vedettes onanistes, et surtout les modèles de ce que la publication personnelle avait à offrir.

Dans ce contexte, j’adore le t-shirt de Marten (c’est bien Marten ?) dans ce strip #604 de Questionable Content, par ailleurs l’un des plus hilarants depuis que je suis la série (Music+Science=Sexy, ça c’est sûr).

Le retour, même limité, de Canclaux est cependant une nouvelle réconfortante. Cela manque tout de même, ces rappels réguliers que des diaristes formidables comme Eva (Regards Solitaires) écrivent toujours. Félicitations, madame.

Mais maintenant, déblatérons, puisque ceci est avant tout un weblog.
J’ai souffert ces trois derniers mois du Syndrome de Guillain-Barré. Cet autre document de quelques pages est encore plus complet, mais je vous déconseille de cliquer sur ces deux liens, ce sont des lectures particulièrement rébarbatives.

En revanche, cette expérience et surtout les échanges que j’ai pu avoir avec le personnel de l’Assistance Publique me permettent de dire quelques mots au sujet des cris d’orfraie poussés à l’annonce récente de la recommandation du Conseil National de la Chirurgie de fermer les blocs opératoires réalisant moins de 2000 actes par an (document PDF). Ce qui signifierait fermer les services de chirurgie de 113 petites structures réparties sur tout le territoire.
J’ai consulté, en l’espace de trois semaines : mon médecin traitant plusieurs fois, le remplaçant de mon médecin traitant plusieurs fois, un spécialiste ORL, un médecin urgentiste (qui m’a renvoyé chez moi), un neurologue de ville, à nouveau plusieurs médecins urgentistes, puis enfin à la demande de ces derniers un neurologue d’un grand hôpital parisien. Seul ce dernier à émis l’hypothèse du Guillain-Barré, qui s’est révélée juste après examens. Les médecins précédents soit ne connaissaient pas la maladie car elle est très rare, soit n’y ont pas pensé car il y avait des hypothèses statistiquement bien plus probables à vérifier auparavant (on notera la générosité qui caractérise cette phrase au point final qui vient immédiatement).
Je lis sur le forum de ce site consacré aux patients français du syndrome des messages effarants de malades orientés vers des services de psychiatrie, de médecine interne, voire renvoyés plusieurs fois chez eux avec des diagnostics de fatigue chronique. Ces témoignages me font froid dans le dos car, en phase de plateau, les difficultés respiratoires et les fausses routes font courir un risque vital ; tandis qu’une hospitalisation, éventuellement en service de réanimation/soins intensifs, avec traitement(s) aux immunoglobulines assure une guérison rapide et sans séquelles à une proportion de patient dépassant largement les 90%.
Le Guillain-Barré ne requiert pas à ma connaissance d’intervention chirurgicale, mais je crains de n’extrapoler que peu en faisant des cauchemars à l’idée d’avoir été pris en charge par un petit hôpital de province dont le service de neurologie n’aurait aucune habitude de ce genre d’affection.
Oui, je crois qu’il est plus pertinent d’obliger les familles à faire 100 km de plus pour venir au chevet de leurs malades dans une large structure aux multiples compétences, que de se complaire dans un sentiment de fausse sécurité parce que l’on a un service d’urgence dans chaque sous-préfecture.

Cela dit, l’hôpital public français, incontestablement l’un des meilleurs du monde, meurt à petit feu depuis trente ans, sous les regards indifférents (voire ravis) des élites politique de notre pays. Ces députés-maires démagogues, hurlant à la mort à l’évocation de la fermeture de leur petit bloc opératoire de proximité, sont bien souvent ceux qui ont subventionné avec l’argent public l’ouverture d’établissements privés, évidemment dirigés par les grands médecins formés par l’hôpital public et faisant comme eux partie de la haute bourgeoisie locale. Plus de 50% des actes de chirurgie sont désormais réalisés dans le privé (chiffre donné par l’Humanité). A titre personnel, je n’ai jamais vu aucun des grands partis auxquels émargent ces élus locaux si remontés imposer la question de la santé publique au débat national. Jusqu’ici, tout va bien, comme disait l’autre.

Sur les sujets liés à la santé, mais pas seulement, lire aussi le nouveau blog de Christian Lehmann, écrivain et médecin.

Et puis d’autre part, il est tout-à-fait fascinant de voir comment en quelques jours la presse d’informations a fait de la véritable Affaire Clearstream (des milliards d’euro qui circulent illégalement parce qu’anonynement via un pays appartenant à l’Union Européenne) un mini-scandale franco-français de magazine people.

Si on se penche sur l’argent du terrorisme, la faillite de l’Argentine, l’affaire Elf, pour rester chez nous, et d’autres scandales, on retombe toujours sur la présence des acteurs de ces affaires dans les listes secrètes de la société. [La véritable] affaire Clearstream est vraiment l’affaire des affaires.

Chers amis,
J’ai été atteint d’une maladie neurologique grave, longue, mais fort heureusement totalement guérissable. J’ai passé les dernières six semaines à l’hôpital. Aujourd’hui, je suis sur pieds, mais j’ai encore à subir quelques jours/semaines (?) de rééducation (kinésithérapie…) avant de récupérer toute ma mobilité. Pour le reste, ce n’est plus qu’un souvenir que je ne sais pas trop dans quelle catégorie ranger.
Merci aux proches et aux autres pour leur soutien. Je reviens bientôt à ce weblog et j’aurai probablement l’opportunité de discuter plus en détails de tout ça.

« Ses maladies à lui sont infiniment plus intéressantes que la santé des autres. » — Jane Birkin à propos de Serge Gainsbourg

Cloué chez moi dans un état comateux et anxiogène, je trouve quelques réconforts sur France Inter, dont je découvre et explore lorsque j’en ai la force la brillante grille de matinée.
Et puis toujours, l’émission du samedi de Philippe Meyer, consacrée depuis quatre semaines à Serge Gainsbourg, et conséquemment d’une classe infernale.

Meyer a lu aujourd’hui ce texte merveilleux de Desproges, que j’ai retrouvé sur le net : Chaminade. C’est un truisme de rappeler que Desproges savait écrire, mais quand je lis « Au reste, il était trop seul au monde pour qu’un prénom lui fût utile » il y a une émotion dingue qui passe (mais c’est peut-être la pharmacopée). Et la construction même du texte est très très forte. Enfin, ça m’a touché, comme à chaque fois que j’entends Souchon évoquer « Jane et Serge sur le Pont des Arts », un symbole indépassable.

Monsieur HUT dit :
Bon. Qu’est-ce que c’est que ce post de merde ?
Emmanuel dit :
ce ke je pense, à part la généralisation provoc qui fait la jonction
Monsieur HUT dit :
tu dois vraiment être super-super mal en point
Monsieur HUT dit :
Ne penses-tu pas que dans ton post, tu te poses toi aussi en victime ?
Emmanuel dit :
oui j’y ai pensé.
Emmanuel dit :
mais j’aime aussi cette incohérence qui rappelle que c’est + un défouloir qu’autre chose
Monsieur HUT dit :
c’est vrai
Monsieur HUT dit :
ce qui me surprend, c’est la disproportion entre l’événement (blessure d’amour-propre) et son développement par écrit, qui présuppose une répercussion émotive qui prend le pas sur la capacité intellectuelle à prendre du recul
Emmanuel dit :
c’est exactement ça.
Emmanuel dit :
tu as raison, c’est un post de merde, mais j’ai une santé de merde depuis deux semaines et j’ai le droit d’avoir un skyblog une fois tous les 6 ans
Monsieur HUT dit :
un skyblog lol
Monsieur HUT dit :
« Epidémie de skyblog dans la blogosphère
Monsieur HUT dit :
la grosse contagion ! Même EW est touché ! »

Y’a pas que dans les commentaires des blogs qu’on trouve des CONNARDS.
Je suis en asthénie complète depuis une semaine, je tiens à peine debout, je ne peux que dormir, et je mange très peu, sans qu’on sache bien pourquoi. Je reviens de ma sortie du jour, difficile, chaque pas est un effort, dans le froid, 50 m a/r pour aller chercher des résultats d’analyse, avec un équilibre précaire, et ce CONNARD de livreur dans la rue me dépasse et me bouscule avec sa grosse palette. Il s’arrête 10 m plus loin ce qui me laisse le temps de le rejoindre (genre 30 secondes, mêmes les petits vieux avec des cannes me dépassent) et je lui demande si ça ne le dérange pas de me bousculer. Il me regarde et répond : et alors, est-ce que je t’ai vu quand je t’ai bousculé ?
je lui ai dit qu’il était un connard — comme on devrait toujours le faire quand on a un peu d’amour-propre, mais tous le monde n’en a pas.
car pour s’excuser, c’est l’intention qui compte apparemment, pas l’acte. je laisse au lecteur le plaisir morbide d’extrapoler à tous les enfers pavés de bonnes intentions.
mes cons/citoyens sont incapables, à 95%, de tenir compte de leur environnement, à TOUS les sens de l’expression — géographique, humain, écologique, signalétique, etc. encagés dans leur petit monde, dans leur grand espoir d’être un jour une Victime, production française n°1 devant le pinard et les accidents de la route. solipsistes ignares même du nom de leur névrose. je persiste et signe dans ce que je disais il y a qq temps : une société démocratique a les élites qu’elle mérite, et Sarkozy sera très naturellement notre prochain président.
et vous savez quoi ? en temps que petit blanc, catholique, laïc, monogame, non fumeur, buvant rarement, non toxicomane, urbain, cadre, exaggérément respectueux du code de la route, salarié, alphabétisé et bac+5, je n’en aurai rien à foutre. le monde, qui en a déjà une certaine intuition, pourra constater votre éclatante médiocrité au grand jour, et moi je vivrai aussi bien, sans plus de préoccupations nocturnes pour la situation des chauffeurs-livreurs périurbains intériméraires.

je ne le pense pas (pas complètement) mais ça défoule de l’écrire.