Allo maman bobo

Allo maman bobo

Je croyais la mode plus éphémère, mais l’emploi du mot “bobo” est de plus en plus répandu. Comme quoi le panurgisme remplace efficacement la réflexion. Ou comme quoi Renaud a encore de nombreux fans, souvent dans des milieux inattendus.
Ce qui me déroute le plus, le terme étant d’une précision inversement proportionnelle à son emploi (trait particulièrement hexagonal, je ne crois pas avoir jamais lu quelque expression équivalente dans la culture anglo-saxonne, posh étant quand même assez différent), c’est mon impossibilité à déterminer si je fais partie de cette nouvelle classe apparemment dégénérée. Se qualifie-t-on en ayant réalisé cinq années d’études, en habitant intra-muros d’une grande ville, en possédant des convictions libérales-libertaires, en affichant des bouquins de Joann Sfar dans sa bibliothèque et en fréquentant les musées, auquel cas me voilà membre de cette grande famille ? Ou faut-il également être propriétaire d’un grand appartement dans un quartier situé sur un axe Saint-Germain-des-Prés/Marais/Porte de Bagnolet, avoir été en vacances à Cuba, avoir déjà mis les pieds chez Colette ou dans un restaurant Costes, et écouter Camille (auquel cas j’en réchappe) ?

Ca m’intéresse quand même pas mal, en ces temps troublés, parce qu’au moment où nous subissons ce raz-de-marée sémantique (et le reflux intellectuel concomittant), je suis entrain de lire un ouvrage assez démoralisant sur un lieu et une époque récente où porter des lunettes, connaître une langue étrangère ou avoir eu une quelconque forme d’éducation supérieure vous assurait une fin immédiate, souvent à coup de gourdin pour économiser les balles (et où l’absence de ces ostensibles caractères ennemis ne vous garantissait absolument pas d’en réchapper, comme le veut le principe de toute révolution passée ou future).

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