Geek

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On s’attend généralement à ce que le geek (j’ai une tendresse pour les gens qui prononcent ce mot jique — j’en ai connu) soit un informaticien. Mon expérience personnelle est pourtant nettement négative sur ce point : le véritable geek, avec partition Linux chez lui et qui connaît la signification du symbole « /. », j’en ai somme toute peu rencontré dans les moult services informatiques que j’ai fréquenté. (Je vous arrête : je n’ai pas de partition Linux, ni chez moi ni nulle part.)
En revanche, il est une catégorie socio-économique peu connue où pourtant l’on retrouve — mes études rigoureuses l’ont montré — l’une des plus fortes proportions de geeks connues : j’ai nommé le vendeur de boutique de jeu. Laissez moi vous narrer quelque fraîche anecdote, d’hier au soir.

Fight! deck KaliUn magasin de jeu. Une fois acquis ce que je venais y chercher, j’ai cédé à l’achat compulsifs de deux decks de Fight!, un jeu de combat en temps réel, vaguement basé sur le thème de Street Fighter et des mangas, et qui n’est en définitive qu’une bataille évoluée, mais bien pensée. Dilemme pour votre serviteur : deux decks sont suffisants pour commencer à jouer, mais on doit les choisir parmi six possibilités, chacune avec ses avantages et ses faiblesses.
Notre ami vendeur, le regard vague de l’ermite vivant dans les cavernes de l’Ered Luin et le t-shirt criard à l’effigie de quelque groupe prog-métal médiéval-fantastique, m’expose les caractéristiques des différentes combinaisons raisonnables, tout en triant un tas de 500 cartes Magic par couleur et par extension, trouble obsessionnel-compulsif probablement professionnel.
Il faut me décider. J’opte pour Kali et un autre « personnage ». Toujours urbain, et terrifié à l’idée de passer pour un joueur du dimanche qui refuse de prendre Tiger, « un gros bourrin qui a beaucoup de Hits mais peu de Blocks, pour un jeu agressif », quel que soit ce que cela signifie… toujours urbain donc, je commente mon choix :
– Je crois que je vais prendre Kali ; étant donné que je compte plusieurs demoiselles au sein de mon groupe de joueur, je pense qu’une fille devrait les rassurer.
Le vendeur me toise alors longuement, avant de répondre, mortellement sérieux :
– Ah non ! Regardez, c’est indiqué au dos du paquet : ce n’est pas une fille, c’est un cyborg.

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