[C5] 002 / Placebo :: Special K
Avertissement aux parents et aux éducateurs : le chanteur de Placebo est un inverti. Oui, mesdames, messieurs, le troublant Brian Molko est une tapette de compétition ("nancy boy" en est la traduction exacte, et le titre d’un de leurs meilleurs morceaux), et pas le genre discret coiffeur de province chouchou des mamies, mais plutôt du style à débarquer sur scène et acceuillir son public d’un magistral : "Vous pouvez m’appeler pouffiasse !". Brian Molko, donc, star glam néo-punk make-uppée l’oréal parce qu’il le vaut bien, puise dans cette ambiguité sexuelle et dans les lumières des projecteurs une aura de sensualité auquel même un hétéro blanc middle-class en couple comme moi n’est pas insensible. En clair, si je devais un jour avoir un rêve érotique gay, j’espère bien que Brian y figurera, ça adoucira un réveil que j’imagine traumatisant. En sus, le Brian, luxembourgeois de son état et donc francophile averti (et inverti mais je l’ai déjà dit), s’est un jour maqué avec deux potes afin de former le groupe, deux proto-hétéros qui font si pale figure en comparaison que je ne me rappelle plus grand’ chose d’eux, si ce n’est qu’ils sont, je crois, britanniques et que l’un d’entre eux portait récemment un iroquois histoire de montrer qu’il pouvait être aussi destroy que sa copine le chanteur.
Mais revenons à la chanson. Placebo, trio batterie-basse-guitare un rien basique, a sorti vers 1996/1997 un premier album éponyme (et azema ; laissez tomber, faut lire des livres) qu’on s’est tous pris comme une grosse claque dans la tanche, un condensé néo-punk tranchant avec des paroles déprimées (rien à voir avec le "punk" FM de bouffons style Limp Biskit ou Bloodhound Gang), comme ce Teenage Angst qui reste une de mes chansons préférées de tous les temps, titre inclus : "Since I was born I started to decay / Now nothing ever goes by way".
Aujourd’hui, avec leur troisième album Black Market Music, nos joyeux lurons se sont calmés en voyant approcher la trentaine (pour agrandir le cercle de leurs fans ? – oh non, je ne vous aurai rien épargné…), et conservent la subversion dans les paroles quand la musique est devenue un peu plus immédiate. Le Special K en question n’est donc pas une céréale du petit déjeuner, comme les plus casaniers pourraient l’imaginer, mais bel et bien une variété d’ecstasy très populaire. Bien sûr, la chanson n’en fait pas l’apologie, oh non, monsieur le programmateur radio, mais elle décrit l’état narcotique qui nous saisit devant l’atroce prosaïté du monde (quand je vous disais que les paroles restaient un peu "ado"). Au final, un bel anthem pop/rock à guitares avec refrain entêtant comme on aime ("no escaping gravity"). Si ça vous plait, l’album en a encore trois ou quatre autres comme ça. Y’a pas de mal à se faire du bien.
Placebo : the brick shithouse