Il me faut dire quelques mots de Blog Story, le livre de Cyril Fiévet et Emily Turrettini consacré à « l’onde de choc » du weblogging dans le monde de l’Internet, et de l’Information au sens large (éditions Eyrolles). Les auteurs m’ont fait le grand honneur de citer Everybody’s Weird (« Concis, clair, pertinent. ») comme l’un de leurs « 20 meilleurs blogs personnels en français », vous êtes donc libres de pondérer les torrents d’éloges qui vont suivre par la proportion de vanité que vous présumerez.

Blog Story est une quasi-complète réussite. Quelques détails anecdotiques titillent le bloggeur grincheux et pointilleux en moi (c’est ainsi que la majorité des webloggeurs sont décrits dans l’ouvrage, avec plus de justesse que nous ne voudrions le croire), et je reviendrai sur l’un d’entre eux à la fin de ce billet, mais au final je n’aurai pû imaginer meilleure introduction au phénomène que ce livre tel qu’il a été rédigé. Même si l’on aurait pu vivre sans la référence creuse à la « Société du Spectacle » et à Warhol (p.73), l’une des seules concessions des auteurs au style journalistique approximatif de l’époque.

Ce que j’ai trouvé particulièrement remarquable dans Blog Story est la prudence des auteurs dans l’exposition des multiples débats qui agitent la blogosphère ; même lorsqu’ils prennent un parti, ils ne le font jamais sans évoquer les arguments adverses, de sorte que même si l’on est pas de leur avis, on n’a pas envie de refermer le livre pour autant. Au final, il ne s’agit pas de la bible d’une chapelle ou d’une communauté d’utilisateurs, mais bien d’un travail de journalistes, qui couvre la plupart des aspects du phénomène.

L’analyse est souvent très fine. J’aime beaucoup, p. 42, qu’ils reprennent les mots d’Olivier Nérot (Amoweba) pour souligner l’une des motivations du bloggeur :

l’utilisateur, fasciné par l’accès à son propre réseau, peut visualiser ses lecteurs, sa communauté, les groupes émergeant autour de lui ! Il retrouve la place qu’il pensait bien devoir toujours occuper : le centre de son univers.

L’importance de cet égo est relativisée dans les pages qui suivent, mais il me semble intéressant que quelqu’un l’ait analysée sans mépris et d’un point de vue sociologique.

Blog Story est un livre parfait pour faire découvrir les blogs aux néophytes, même si les pratiquants découvriront de nombreuses informations à sa lecture : ce petit monde va tellement vite qu’il est précieux de disposer d’une approche historique et d’une mise en perspective que ce livre procure aussi.

Pour finir, et en rappelant que c’est tout à fait anecdotique par rapport à l’ensemble de ce livre de 300 pages, je suis cependant très critique vis-à-vis d’un paragraphe, une page, de Blog Story, qui me semble en totale opposition à la ligne de stricte objectivité adoptée dans le reste du livre. Ca se trouve pp. 208-209, dans le chapitre consacré aux rapports entre les bloggeurs et l’argent, et ça évoque la pertinence de la récolte de fonds par annonce publicitaire sur un blog populaire. Voici le passage qui me fait grincer des dents :

…les blogueurs les plus fervent jugent que la publicité est à bannir, par principe. Pour une large part, cela nous semble être un combat d’arrière-garde, d’autant qu’il revient à considérer que la publicité est mauvaise en soi, ce qui est assurément simpliste.

Je n’ai pas d’avis tranché dans ce débat, il est facile de trouver exemples et contre-exemples illustrant les deux points de vue opposés. Mais ce qui me semble, à moi, assurément simpliste, c’est la position béni-oui-oui des auteurs. Ce qui est corroboré par la phrase qui suit immédiatemment :

On peut même espérer, via les blogs, que la publicité se fasse plus intelligente et plus pertinente.

On peut aussi espérer, via Lionel Jospin, que le Parti Socialiste se préoccupe des 50% de foyers français qui gagnent moins de 1500 euro par mois. Ou que, via Bernard Kouchner, le colonialisme industriel français se fasse dans le respect des droits de l’être humain. Ou que, via Colin Powell, la guerre ne se fasse juste et économe en vies d’innocents. On peut même espérer que, via les progrès de l’orthodontie, les poules aient très prochainement des dents. On peut. Mais on est un gros bêta naïf, du pain béni pour tous ceux qui vivent par et pour le Mensonge comme valeur et comme moyen.

Plus loin :

Un blogueur prendrait-il le risque de recommander un produit qu’il a jugé mauvais, juste pour gagner quelques euros – et risquer de perdre de nombreux lecteurs ? Très vraisemblablement, non.

J’ai de la peine à croire que ce paragraphe a été écrit par les mêmes auteurs, responsables des 299 autres pages, remarquablement informées et pertinentes. Ce qui semble sûr, c’est qu’eux et moi ne vivont pas dans le même monde (il paraît que la Suisse est paisible, mais là… (humour)). Qui croit encore que l’absence d’intégrité fait « perdre de nombreux lecteurs » ? Vous avez consulté le tableau des 5 blogs francophones les plus visités ? Cyril, en particulier, me semble sensibilisé (mais j’admets que cette révélation a dû avoir lieu après le bon à tirer) au manque d’éthique de certains d’entre eux, sans que cela perturbe le moins du monde leur impressionnant lectorat. Et je n’évoque même pas l’analphabète MiF, au zénith grâce au poids médiatique d’une blogueuse historique qui est d’accord avec 10% de son riche argumentaire (bien qu’apparemment ce ne soit ni le racisme non assumé parce qu’il a de très bon amis pas blancs, ni la réjouissance bruyante à l’annonce de l’assassinat d’un journaliste francophone laissant femme et enfants). Les weblogs, il n’y a pas de raisons qu’il en soit autrement, rassemblent (et au fur et à mesure de leur démocratisation cela va aller en s’amplifiant) la même galerie de médiocres demi-penseurs que le monde réel ; c’est pour cela qu’on y trouve des égotistes, des escrocs, aucune génération spontanée de journalistes improvisés, et beaucoup de gens bien.

Comic Sans

Comic Sans

Oyez, oyez, laissez-moi vous narrer les belles aventures du Petit Sarkozyste.

Ces aventures sont garanties 100% conformes à la réalité, je vous l’assure : j’ai le Petit Sarkozyste en face de moi tous les jours de la semaine.

Le Petit Sarkozyste tape sur le système de tout le monde en venant expliquer, du haut de ses 18 mois d’expérience professionnelle, comment l’on doit procéder en informatique. Mais moi, je suis un peu au dessus de ça : je suis là depuis à peine plus longtemps que lui et j’ai peu d’indulgence pour leur navrante application ; ce qui m’amuse le plus ce sont les réparties du Petit Sarkozyste.

1. Le Petit Sarkozyste habite dans le Vème, et en matière de délinquance, il a des certitudes

[Strip 1]

C’est cette aventure qui a amené, dans les conversations que j’ai avec Gregor, mon ami imaginaire, son surnom au Petit Sarkozyste.

2. Le Petit Sarkozyste s’y connait en géopolitique autant que Matt Welch.

[Strip 2]

Ouais, et en Afrique j’emmène ma marmite.

3. Le Petit Sarkozyste est cinéphile.

[Strip 3]

Vivement qu’ils fassent un film avec Audrey Tautou.

4. (Ma préférée) Le Petit Sarkozyste est mélomane.

[Strip 4]

Non, non, de Barbara Streisand.

[Merci à Everland]

Bonus pour la route :

Figaro Magazine : Sarkozy brise les tabous

Entre autres.

Quelques petites choses intéressantes dans le Libération d’aujourd’hui.

Un éditorial de Pierre Marcelle, qui cite une revue philosophique récente :

« La droite a compris cela : qu’il suffit de faire de l’existence une angoisse pour n’avoir plus à gouverner que des enfants. »

L’intervention de Daniel Schneidermann.

Mais ce soir, c’est samedi soir et on s’en moque. On ne se prend pas la tête. On s’attendrit les cerveaux entre nous, autour d’Arthur, entre rois du rire, avec un invité vedette : Jack Lang, ancien ministre.

Et surtout, ce Rebond : L’Agent Orange ravage encore le Vietnam

Un million d’hommes, de femmes et d’enfants, tous victimes de la plus grande guerre chimique menée au XXe siècle.

Et il paraît même qu’on y trouve un ou deux articles intéressants à propos — entre autres — d’un certain blogzine. Chez nous, c’est Amour, Gloire et Beauté.

Vous,

Tant d’éducation, tant de livres, et personne ne vous a encore dit qu’il était malpoli de spammer les gens (grotesquement égotiste, au surplus, quand c’est pour parler de soi).

Je n’ai que faire de l’insignifiant Dantec et de ses romans de gares. Mes condoléances au Canada.

Bon combat contre l’omniprésente « propagande socialo-communiste » (des grands patrons de presse ?) et, surtout, contre LE MAL (bouh!).

E.

C’est tombé hier : Craig Ward et Danny Mommens ont quitté dEUS, remplacés par Alan Gevaert et Mauro Pawlowski.

I also have the honour to announce that Stef Kamil Carlens will add his wonderful voice on a couple of songs on the album and that you can call me a freaking liar if we don’t do our best, most focussed gigs in the tours to come.

It’ll be with a vengeance, believe me.

[via nameless]

Ambition est un jeu de cartes pour 4 joueurs, avec un jeu classique de 52 cartes. Il a été créé fin 2003 et en quelques mois « a évolué du statut de jeu maison improvisé à une reconnaissance internationale ».

On comprend pourquoi : il a l’air très fin et fort amusant.

Le site qui héberge ces règles propose (ô joie !) tout plein de jeux de cartes inventés.

Mise à Jour : Mister Hut nous signale en commentaires, sur ce même site et dans un genre radicalement différent, le « sublime » Ace of Death. Ca a l’air tout bonnement génial, et effectivement, une version sex, ça enverrait du bois.

Le New York Time prend position, dans un article circonstancié et d’une rare pugnacité : John Kerry for President (pour se connecter : BugMeNot).

With the grieving country united behind him, Mr. Bush had an unparalleled opportunity to ask for almost any shared sacrifice. The only limit was his imagination.

He asked for another tax cut and the war against Iraq.

D’un autre côté, je vois au moins deux aspects positifs à George W. Bush. Le premier est qu’il n’a tué personne au Vietnam (il aurait eu du mal), contrairement (probablement) à son concurrent qui semble en être très fier.

La seconde, c’est qu’une victoire de Kerry aurait un effet essentiellement soporifique, changeant certains aspects (à l’Intérieur) de la politique américaine, mais pas fondamentalement la désastreuse idéologie hégémonique extérieure. C’est bien Clinton qui a mis le Kosovo sous un tapis de bombes… L’arrogance de Bush compense plus de cynisme par moins d’hypocrisie, et son « management inepte » (comme dit le NY Times) de l’économie va peut-être précipiter ce déclin civilisationnel que certains économistes prédisent aux Etats-Unis depuis dix ans déjà.

Si Hitler avait cotisé au MEDEF, j’imagine qu’il aurait nommé son programme Plan de Sauvegarde du Judaïsme.

Remarquez, encore de nos jours on peut lire dans les livres d’écoles que Hiroshima a sauvé des vies.

« Tant qu’à avoir un gros tremblement de terre, autant que ce soit en Arménie où ils n’ont rien plutôt qu’à Limoges, avec toute la porcelaine. »
— Jean-Marie Gourio

Le Lay Style

Le Lay Style

On m’envoie ceci :

Citations du Président du groupe Schneider Electric, en direct sur France Inter lundi [11 octobre] matin, pendant qu’il accompagnait Jacques Chirac en Chine :

« La démocratie n’est pas le meilleur régime pour soutenir la croissance, c’est une des raisons pourquoi l’Inde n’a pas le même succès que la Chine. »

Je ne l’ai moi-même pas entendu, et la plupart des remarques l’on pourrait faire rélèveraient d’une facilité certaine, je n’aurai donc que ce conseil à Schneider Electric : prenez contact tout de suite avec Bernard Kouchner, en cas de problèmes futurs c’est un garçon très utile.