Invicible

Invicible

Out of the night that covers me,
Black as the pit from pole to pole,
I thank whatever gods may be
For my unconquerable soul.

In the fell clutch of circumstance
I have not winced nor cried aloud
Under the bludgeonings of chance
My head is bloody, but unbowed.

Beyond this place of wrath and tears
Looms but the Horror of the shade,
And yet the menace of the years
Finds and shall find me unafraid.

It matters not how strait the gate,
How charged with punishments the scroll,
I am the master of my fate :
I am the captain of my soul.

William Ernest Henley, Invictus (1875).

Parabole

Parabole

Parable of the Polygons est l’une des pages web les plus importantes que j’ai vues cette année. Avec des règles mathématiques très simples, elle montre l’effet cumulatif que peuvent avoir de petits préjugés individuels sur l’ensemble d’une société.

Puis, dans une articulation surprenante, elle montre l’efficacité (ou non) à contrebalancer une situation de départ inégalitaire par la diminution des préjugés individuels.

Ce qui est particulièrement magnifique est que seule la logique la plus systématique (et la plus abstraite) est employée ; très peu de subjectivité là dedans.</l’informaticien autiste>

Tout ça est en plus très marrant, avec de jolis dessins mignons et des petits jeux très rapides.

Faites moi plaisir, courez regarder ça. (Et fuyez la traduction « française », baclée et ignoble.)

Les sentiers escarpés

Les sentiers escarpés

Question assez préoccupante, à mon sens : peut-on, ou pas, joindre dans une même idéologie Karl Marx et le « soviétisme », voire le stalinisme.

Un élément de réponse à décharge :

« Indépendamment de motivations plus nobles, c’est leur intérêt propre le plus réel qui commande aux classes actuellement dominantes de balayer tous les obstacles contrôlables légalement qui freinent encore le développement de la classe ouvrière. (…) Même lorsqu’une société est sur le point de parvenir à la connaissance de la loi naturelle qui préside à son évolution — et la fin ultime visée par cet ouvrage est bien de dévoiler la loi d’évolution économique de la société moderne — elle ne peut cependant ni sauter, ni rayer par décret les phases naturelles de ce développement. Mais elle peut abréger et atténuer les douleurs de l’enfantement. (…)

Moins que toute autre encore, ma perspective, qui consiste à appréhender le développement de la formation économico-sociale comme un processus historique naturel, ne saurait rendre un individu singulier responsable de rapports et de conditions dont il demeure socialement le produit, quand bien même il parviendrait à s’élever, subjectivement, au-dessus de ceux-ci. »

— Karl Marx, Le Capital, livre I, préface à la première édition allemande (1867)

 

En bonus :

« Il n’y a pas de route royale pour la science, et ceux-là seulement ont chance d’arriver à ses sommets lumineux qui ne craignent pas de se fatiguer à gravir ses sentiers escarpés. »

— Préface à l’édition française (1872), écrite en français par Marx

God Help the Girl

God Help the Girl

Charmant et décousu, irrésistible et superficiel, God Help the Girl, le film musical de Stuart Murdoch, est le bijou indie-pop de cette fin d’année.

On connait les chansons, merveilleuses : elles proviennent de l’album du même nom de 2009. Elles sont sublimées ici par un Glasgow perpétuellement ensoleillé, trois jeunes acteurs beaux et touchants, habillés avec une classe folle, et une photographie splendide.

C’est un conte post-adolescent, hors du monde, qui s’embarasse peu de cohérence, juste un très bon moment parfaitement composé, pour les fans de Belle & Sebastian.

En bonus, le making-of en cinq (petits) épisodes et la B.O. sur Spotify.

Unfairness

Unfairness

Chris Rock on white people refusing to own up and think about the history of race relationships :« Yeah, it’s unfair that you can get judged by something you didn’t do, but it’s also unfair that you can inherit money that you didn’t work for. »

The critique of pop culture

The critique of pop culture

Alex Ross, The Naysayers — The New Yorker, 15 sept. 2014
“Walter Benjamin, Theodor Adorno, and the critique of pop culture.”

Si un génie m’avait accordé un texte (brillantissime) sur un sujet criminellement vague pour moi et un auteur pour le clarifier, j’aurais probablement choisi Alex Ross sur l’Ecole de Francfort.
L’internet des longreads c’est un peu la lampe magique.

Update : justement sur (un peu) le même thème, ceci :

Adam Leith Gollner, An Investigation Into the Reappearance of Walter Benjamin — 11 sept. 2014
“Now, seventy-four years after his death, Walter Benjamin is releasing Recent Writings, a new collection of nine essays written between 1986 and 2013.”

Mon A.D.N.

Mon A.D.N.

Charmant petit documentaire (26 minutes), malgré la voix de PPDA, sur cette femme étonnante, hors de son siècle, que fut Alexandra David-Néel, et sa maison à Digne. Véritable intellectuelle, arpenteuse infatigable, anarchiste, féministe, bouddhiste ardente, écrivain magnifique, parfois péremptoire et simpliste comme peuvent l’être les précurseurs fascinés, souvent juste et bienveillante à rebours de son époque, coloniale et guérrière.

Cette petite chose ne fait qu’effleurer tout cela, mais avec une élégance si peu télévisuelle qu’il faut la saluer.

Disorientated by our success

Disorientated by our success

Un superbe documentaire sur dEUS datant de 2009, probablement à réserver aux fans. J’imagine qu’il a été produit à l’occasion de la re-issue de leur premier album, Worst Case Scenario — c’en est le making-of, avec des interviews du line-up original (incluant donc Stef Kamil Carlens et Rudy Trouvé). Cela s’appelle Time is the state of my jeans :

Deux passages particulièrement marquant, chacun à leur manière, pour lesquels je n’ai pu me retenir de faire le storyboard :

Amoureux d’Anne Frank

Amoureux d’Anne Frank

Anne FrankAfin de traverser le Marais, il aimait faire le court détour qui passait par la rue des Rosiers. Esquivant les rabatteurs des restaurants de falafels et les tracts des missionnaires orthodoxes, il se plaisait à observer les jeunes et souvent jolies ashkénazes américaines, dépaysées dans ce shtetl anti-haussmannien et illuminées par la promesse d’un encas aux réminiscences familiales.
Qui n’a pas été amoureux d’Anne Frank à quatorze ans n’a pas de cœur, rêvait-il, se rappelant de ses séjours à Amsterdam avec un mélange d’horreur et de mélancolie indémêlable. Il imaginait volontiers sa vie ayant pris un tour tout autre, vivant une histoire d’amour avec ces new-yorkaises aux cheveux bruns, peut-être une Shoshanna, peut-être violoniste. Marié, et pourquoi pas converti. Il s’enivrait d’un voyage improbable à Vilnius, sur les traces d’un arrière-arrière-grand-oncle rabbin et fameux, et croyait presque sentir l’odeur d’encens rance de vieilles synagogues lituaniennes miraculeusement préservées par les désastres modernes.
Plus loin, rue des Nonnains d’Hyères, tout cela se dissipait à mesure que la Seine se précisait en contrebas. La vue d’une chevelure blonde et d’une robe à fleur très parisienne le rappelaient à une psycho-géographie plus rationnelle. Il s’engouffrait dans le métro le cœur allégé, emportant avec lui la possibilité enivrante d’une vie différente, le cadeau inépuisable de cette ville.