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Author: manur

Boys, Girls, Love

Boys, Girls, Love

Boys, Girls, LoveLa compilation n°10 est disponible. Elle s’appelle « Boys, Girls, Love » et c’est peu ou prou celle que l’on a pu écouter sur la radio blog. On y retrouve Magnus, Laura Veirs, les Pernice Brothers, Onelinedrawing, les Dresden Dolls et bien d’autres.

Contactez-moi rapidement par mail pour en obtenir un exemplaire.

J’étais tranquillement entrain de lire les Mythologies il y a quelques instants, lorsque Roland Barthes a requis la parole dans le débat advenu quelques lignes ci-dessous. Laissons-la lui :

Voici le schéma de cette nouvelle démonstration : prendre la valeur d’ordre que l’on veut restaurer ou développer, manifester d’abord longuement ses petitesses, les injustices qu’elle produit, les brimades qu’elle suscite, la plonger dans son imperfection de nature ; puis au dernier moment la sauver malgré ou plutôt avec la lourde fatalité de ses tares. (…)

Et puis le bon sens fait ses comptes : que sont les menues scories de l’ordre au prix de ses avantages ? (…) Qu’importe, après tout, que l’ordre soit un peu brutal ou un peu aveugle, s’il nous permet de vivre à bon marché ? Nous voilà, nous aussi, débarassés d’un préjugé qui nous coûtait cher, trop cher, qui nous coûtait trop de scrupules, trop de révoltes, trop de combats et trop de solitude.

Tous les matins à 8h35 sur France 3, c’est l’adaptation en dessin animé du Petit Vampire de Joann Sfar, et c’est assez génial.

Sur le site de Sfar, on trouve aussi Donjon : le Jeu de Rôle (d’après la série de BDs avec Trondheim et Blain), pas assez abouti pour être pratiqué, mais c’est quand même top.

Il me faut dire quelques mots de Blog Story, le livre de Cyril Fiévet et Emily Turrettini consacré à « l’onde de choc » du weblogging dans le monde de l’Internet, et de l’Information au sens large (éditions Eyrolles). Les auteurs m’ont fait le grand honneur de citer Everybody’s Weird (« Concis, clair, pertinent. ») comme l’un de leurs « 20 meilleurs blogs personnels en français », vous êtes donc libres de pondérer les torrents d’éloges qui vont suivre par la proportion de vanité que vous présumerez.

Blog Story est une quasi-complète réussite. Quelques détails anecdotiques titillent le bloggeur grincheux et pointilleux en moi (c’est ainsi que la majorité des webloggeurs sont décrits dans l’ouvrage, avec plus de justesse que nous ne voudrions le croire), et je reviendrai sur l’un d’entre eux à la fin de ce billet, mais au final je n’aurai pû imaginer meilleure introduction au phénomène que ce livre tel qu’il a été rédigé. Même si l’on aurait pu vivre sans la référence creuse à la « Société du Spectacle » et à Warhol (p.73), l’une des seules concessions des auteurs au style journalistique approximatif de l’époque.

Ce que j’ai trouvé particulièrement remarquable dans Blog Story est la prudence des auteurs dans l’exposition des multiples débats qui agitent la blogosphère ; même lorsqu’ils prennent un parti, ils ne le font jamais sans évoquer les arguments adverses, de sorte que même si l’on est pas de leur avis, on n’a pas envie de refermer le livre pour autant. Au final, il ne s’agit pas de la bible d’une chapelle ou d’une communauté d’utilisateurs, mais bien d’un travail de journalistes, qui couvre la plupart des aspects du phénomène.

L’analyse est souvent très fine. J’aime beaucoup, p. 42, qu’ils reprennent les mots d’Olivier Nérot (Amoweba) pour souligner l’une des motivations du bloggeur :

l’utilisateur, fasciné par l’accès à son propre réseau, peut visualiser ses lecteurs, sa communauté, les groupes émergeant autour de lui ! Il retrouve la place qu’il pensait bien devoir toujours occuper : le centre de son univers.

L’importance de cet égo est relativisée dans les pages qui suivent, mais il me semble intéressant que quelqu’un l’ait analysée sans mépris et d’un point de vue sociologique.

Blog Story est un livre parfait pour faire découvrir les blogs aux néophytes, même si les pratiquants découvriront de nombreuses informations à sa lecture : ce petit monde va tellement vite qu’il est précieux de disposer d’une approche historique et d’une mise en perspective que ce livre procure aussi.

Pour finir, et en rappelant que c’est tout à fait anecdotique par rapport à l’ensemble de ce livre de 300 pages, je suis cependant très critique vis-à-vis d’un paragraphe, une page, de Blog Story, qui me semble en totale opposition à la ligne de stricte objectivité adoptée dans le reste du livre. Ca se trouve pp. 208-209, dans le chapitre consacré aux rapports entre les bloggeurs et l’argent, et ça évoque la pertinence de la récolte de fonds par annonce publicitaire sur un blog populaire. Voici le passage qui me fait grincer des dents :

…les blogueurs les plus fervent jugent que la publicité est à bannir, par principe. Pour une large part, cela nous semble être un combat d’arrière-garde, d’autant qu’il revient à considérer que la publicité est mauvaise en soi, ce qui est assurément simpliste.

Je n’ai pas d’avis tranché dans ce débat, il est facile de trouver exemples et contre-exemples illustrant les deux points de vue opposés. Mais ce qui me semble, à moi, assurément simpliste, c’est la position béni-oui-oui des auteurs. Ce qui est corroboré par la phrase qui suit immédiatemment :

On peut même espérer, via les blogs, que la publicité se fasse plus intelligente et plus pertinente.

On peut aussi espérer, via Lionel Jospin, que le Parti Socialiste se préoccupe des 50% de foyers français qui gagnent moins de 1500 euro par mois. Ou que, via Bernard Kouchner, le colonialisme industriel français se fasse dans le respect des droits de l’être humain. Ou que, via Colin Powell, la guerre ne se fasse juste et économe en vies d’innocents. On peut même espérer que, via les progrès de l’orthodontie, les poules aient très prochainement des dents. On peut. Mais on est un gros bêta naïf, du pain béni pour tous ceux qui vivent par et pour le Mensonge comme valeur et comme moyen.

Plus loin :

Un blogueur prendrait-il le risque de recommander un produit qu’il a jugé mauvais, juste pour gagner quelques euros – et risquer de perdre de nombreux lecteurs ? Très vraisemblablement, non.

J’ai de la peine à croire que ce paragraphe a été écrit par les mêmes auteurs, responsables des 299 autres pages, remarquablement informées et pertinentes. Ce qui semble sûr, c’est qu’eux et moi ne vivont pas dans le même monde (il paraît que la Suisse est paisible, mais là… (humour)). Qui croit encore que l’absence d’intégrité fait « perdre de nombreux lecteurs » ? Vous avez consulté le tableau des 5 blogs francophones les plus visités ? Cyril, en particulier, me semble sensibilisé (mais j’admets que cette révélation a dû avoir lieu après le bon à tirer) au manque d’éthique de certains d’entre eux, sans que cela perturbe le moins du monde leur impressionnant lectorat. Et je n’évoque même pas l’analphabète MiF, au zénith grâce au poids médiatique d’une blogueuse historique qui est d’accord avec 10% de son riche argumentaire (bien qu’apparemment ce ne soit ni le racisme non assumé parce qu’il a de très bon amis pas blancs, ni la réjouissance bruyante à l’annonce de l’assassinat d’un journaliste francophone laissant femme et enfants). Les weblogs, il n’y a pas de raisons qu’il en soit autrement, rassemblent (et au fur et à mesure de leur démocratisation cela va aller en s’amplifiant) la même galerie de médiocres demi-penseurs que le monde réel ; c’est pour cela qu’on y trouve des égotistes, des escrocs, aucune génération spontanée de journalistes improvisés, et beaucoup de gens bien.