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Author: manur

Satan Rocks !

Satan Rocks !

Bon Diable, qu’est-ce que j’ai ri ! Hatred, groupe de metal pré-adolescent et écossais, doit donner son premier concert dans deux semaines. C’est encore plus drôle que ce docu hilarant sur Metallica où James Hetfield se casse de répét’ tous les jours à quatre heures (de l’après-midi) car sa femme ou son psy (je ne sais plus) l’oblige à aller chercher son gamin à la crèche. Trop metal !

En plus ça se finit bien, et il y a là-dedans le papa le plus cool de toute la terre.
(File under: Les beaux gosses)

Corps de femme

Corps de femme

Pablo Néruda, Corps de femme (et vingt poèmes d’amour) :

Corps de femme, blanches collines, cuisses blanches,
l’attitude du don te rend pareil au monde.

Je ne lis pas l’espagnol, mais comme pour Borges, c’est une langue où la poésie des mots se suffit à elle-même :

Cuerpo de mujer, blancas colinas, muslos blancos,
te pareces al mundo en tu actitud de entrega.

La musique classique, c’est électrique

La musique classique, c’est électrique

Slate.fr : La musique classique, c’est vraiment fantastique.

[A la Blogothèque], nous nous auto-censurions en bons prisonniers du cliché qui veut qu’une très solide culture, supposée grande ou supérieure, soit un pré-requis indépassable pour pouvoir comprendre [la musique classique]. Mais est-ce vraiment un cliché?

Ça parait tout simplement aberrant à première vue. Ça revient à considérer qu’il faut être capable d’identifier chaque sample d’un morceau de hip-hop pour en comprendre le propos, ou qu’il faut avoir été anthropologue à Tombouctou pour comprendre le jeu de Toumani Diabaté.

Mis à part un titre et un chapeau qui me font un peu crisser les dents, mon ex-camarade Alexandre offre là un excellent plaidoyer pour la musique notée, celle qui dure depuis un peu plus longtemps que Robert Johnson et qui doit donc peut-être n’être pas si inintéressante que ça.

Révolutions d’opéra

Révolutions d’opéra

L’opéra est un art qui peut être tellement fort, tellement intime, qu’il a déjà été, par deux fois, l’origine d’une révolution.
En 1830, une représentation de La Muette de Portici d’Auber (un français) à la Monnaie de Bruxelles galvanisera l’énergie des révolutionnaires (« Non, plus d’oppresseurs, plus d’esclaves / Combattons pour briser nos fers ») et aboutira à la création de la Belgique après séparation d’avec les Pays-Bas.

Quelques années plus tard, en 1842, Giuseppe Verdi donne à la Scala la première de Nabucco. Milan est occupée par les Autrichiens, dans l’œuvre les Hébreux — incarnés par un choeur omniprésent et personnage à part entière — sont opprimés par les Assyriens et leur roi, Nabuccodonosor. La douleur de l’oppression et le courage de la résistance du peuple parlent aux milanais. Au troisième acte, le célebrissime Va, pensiero résonnera pendant de longues années comme le chant de la libération en marche, et figure encore aujourd’hui comme hymne national bis. La fin de l’occupation adviendra six années plus tard, en 1848, dans le cadre du Risorgimento, la « résurrection » d’une Italie unie après des siècles d’éclatement en états pontificaux, cités-états et royaumes régionaux.
A l’occasion des 150 ans de l’Italie réunifiée, Nabucco a été donné à Rome il y a quelques jours par Riccardo Muti. La vidéo ci-dessous présente le Va, pensiero, qui est bissé (fait exceptionnel) et repris par le public après une intervention du maestro Muti, qui fustige le traitement de la Culture par le gouvernement. Berlusconi est dans la loge présidentielle. A côté d’un cardinal. C’est un moment exceptionnel.

Le maître du générique

Le maître du générique

The Saul Bass’ Title Sequences Collection.

« Until then the credits were referred to as ‘popcorn time.’ Audiences resented them and projectionists only pulled back the curtains to reveal the screen once they’d finished. Bass created some of the best title sequences ever for some of the best directors who ever lived (Billy Wilder, Alfred Hitchcock, Otto Preminger, Stanley Kubrick, Martin Scorsese) and some of the best films ever made (Vertigo, North by northwest, Anatomy of a murder, Spartacus, Goodfellas). »

À l’ombre des jeunes filles en fleur

À l’ombre des jeunes filles en fleur

« Mais la caractéristique de l’âge ridicule que je traversais — âge nullement ingrat, très fécond — est qu’on n’y consulte pas l’intelligence et que les moindres attributs des êtres semblent faire partie indivisible de leur personnalité. Tout entouré de monstres et de dieux, on ne connaît guère le calme. Il n’y a presque pas un des gestes qu’on a faits alors, qu’on ne voudrait plus tard pouvoir abolir. Mais ce qu’on devrait regretter au contraire, c’est de ne plus posséder la spontanéité qui nous les faisait accomplir. Plus tard on voit les choses d’une façon plus pratique, en pleine conformité avec le reste de la société, mais l’adolescence est le seul temps où l’on ait appris quelque chose. »
— Marcel Proust, À l’ombre des jeunes filles en fleur

Je referme le deuxième volume de La recherche du temps perdu avec un sentiment familier mais toujours étonnant. On dit communément Proust difficile, alambiqué et intellectuel, le genre de lecture donc qu’on prendra comme un effort d’hypôkhagneux ; dont tout être normalement constitué s’épargnera les interminables subordonnées et la sensibilité défraîchie si « un sadique ou un imbécile » (comme dirait l’autre) ne les lui impose pas.

Pourtant, en se tenant face à l’œuvre, dans l’intimité de la lecture, ce roman est tout ce qu’il y a de plus accessible, de plus humain, de plus universel. Je ne reviens d’ailleurs pas de ce que ce message diffamant fasse de l’ombre à la vérité : les Jeunes filles en fleur est probablement le grand roman français de l’adolescence (pourquoi n’y a-t-il aucun prof pour vous dire des choses comme ça dans les lycées ?), et le narrateur, dans son effort de mémoire pointilliste et exhaustif, un équivalent hexagonal de Werther ou d’Holden Caulfield.

L’œuvre n’est pas sans défauts : particulièrement attristante pour moi est l’idéologie fin-de-siècle (et début du suivant) que Proust admet et illustre involontairement ; d’abord par une grande indulgence pour l’antisémitisme, considéré le temps de quelques pages comme le plus raisonnable des a priori. Puis, tandis qu’il décrit avec une subtilité bouleversante (et indémodable) les émois de son narrateur pour la petite bande d’Albertine, Andrée, Gisèle et Rosemonde, Proust fait par ailleurs preuve d’une homophobie glaçante, offrant le rôle le plus détestable du roman à un vieil inverti pervers et honteux (il paraît que cela ne s’arrange pas par la suite). Certes, il ne faut pas plaquer des valeurs contemporaines sur une époque révolue, tout ça, mais chez un franchouillard nazillon comme Céline, tout cela me fait rire. En revanche chez un homosexuel invétéré et juif, ce degré de « haine-de-soi » (j’imagine bien que la notion est anachronique) est stupéfiant. (Et ce que j’ai trouvé sur le sujet sur Internet ne m’a pas donné à penser que tout ceci soit totalement ou partiellement du second degré.)

A l’exception de ces quelques pages, A l’ombre des jeunes filles en fleur est un roman délicieux, d’une finesse d’analyse rarement égalée, plein de trouvailles poétiques et d’aphorismes sociologiques inimitables, et surtout absolument pas un livre exigeant.

« Pour les belles filles qui passaient, du jour où j’avais su que leurs joues pouvaient être embrassées, j’étais devenu curieux de leur âme. Et l’univers m’avait paru plus intéressant. »
— Marcel Proust, À l’ombre des jeunes filles en fleur

Golden Arrow

Golden Arrow

D’accord, j’ai été injuste il y a quelques semaines avec la Flèche d’Or, qui a apparemment été reprise par une autre équipe, et qui a été réaménagée pour le meilleur : le bar, qui était à trois mètres de la scène au milieu de la salle, a été repoussé tout au fond ; la place disponible s’en est trouvée agrandie ; le son a été grandement amélioré (même s’il reste assez « brutal ») ; et enfin, l’entrée est désormais payante (et le tarif des consommations rendu raisonnable), nous épargnant partiellement toute une faune de soifards pour qui la musique n’était que l’écrin de conversations passionnantes. Reste que j’ignore pourquoi l’entrée/sortie du public se fait toujours à côté de la scène, ce qui aurait pu être aisément changé compte tenu des autres issues déjà existantes.

Quoi qu’il en soit j’avais tort et j’étais en retard : la Flèche d’Or est devenue une salle correcte. C’est une bonne nouvelle dans le paysage sinistré des lieux de musique à Paris.