Top 2015 (#23)
23. Lubomyr Melnyk – Rivers and Streams
Les morceaux du compositeur Lubomyr Melnyk vont par flux et reflux, construisent par nappes une émotion qui a toujours été là, se meuvent sans cesse mais avancent avec la prudence d’une caresse. Le compositeur en a posé les bases à Paris dans les années 1970, mais cette musique forme surtout un autre versant, moins connu et plus romantique, du minimalisme américain. (Les pièces pour piano de Philip Glass, qu’une vie ne me suffira probablement pas à épuiser, en constituent un complément éloquent.)
La musique de Lubomyr Melnyk émerge d’une avalanche pianistique très maîtrisée qui laisse la réverbération fondre entre elles les notes. Cette virtuosité, qui est souvent la qualité la moins intéressante d’un musicien, est ici au service d’un véritable but ; si le pianiste a développé son jeu afin d’atteindre des vitesses rares (peut-on lire) ce n’est pas par épate mais pour approcher, par cette pratique de concentration intense, ce que dans un entretien il nomme « la transcendance par le piano ». Un peu de cette transcendance passe à l’écoute, et peut-être nous rend-elle meilleurs.