Allo maman bobo
Je croyais la mode plus éphémère, mais l'emploi du mot “bobo” est de plus en plus répandu. Comme quoi le panurgisme remplace efficacement la réflexion. Ou comme quoi Renaud a encore de nombreux fans, souvent dans des milieux inattendus.
Ce qui me déroute le plus, le terme étant d'une précision inversement proportionnelle à son emploi (trait particulièrement hexagonal, je ne crois pas avoir jamais lu quelque expression équivalente dans la culture anglo-saxonne, posh étant quand même assez différent), c'est mon impossibilité à déterminer si je fais partie de cette nouvelle classe apparemment dégénérée. Se qualifie-t-on en ayant réalisé cinq années d'études, en habitant intra-muros d'une grande ville, en possédant des convictions libérales-libertaires, en affichant des bouquins de Joann Sfar dans sa bibliothèque et en fréquentant les musées, auquel cas me voilà membre de cette grande famille ? Ou faut-il également être propriétaire d'un grand appartement dans un quartier situé sur un axe Saint-Germain-des-Prés/Marais/Porte de Bagnolet, avoir été en vacances à Cuba, avoir déjà mis les pieds chez Colette ou dans un restaurant Costes, et écouter Camille (auquel cas j'en réchappe) ?
Ca m'intéresse quand même pas mal, en ces temps troublés, parce qu'au moment où nous subissons ce raz-de-marée sémantique (et le reflux intellectuel concomittant), je suis entrain de lire un ouvrage assez démoralisant sur un lieu et une époque récente où porter des lunettes, connaître une langue étrangère ou avoir eu une quelconque forme d'éducation supérieure vous assurait une fin immédiate, souvent à coup de gourdin pour économiser les balles (et où l'absence de ces ostensibles caractères ennemis ne vous garantissait absolument pas d'en réchapper, comme le veut le principe de toute révolution passée ou future).
6 Commentaire(s) :
1) Le fait d'accoler "bourgeois" et "bohème" vient des Etats-Unis (je n'ai pas la référence mais ça peut se retrouver facilement).
2) Cuba, c'est fini. Plus "in" : L'Argentine et le Viet-nam.
3) Le 12ème n'est pas (encore) bobo, te voilà sauvé.
signé Rom, le 30/7/06 17:02
Allo Maman Bobo, c'est Renaud ? Je croyais que c'était Souchon ou qlq un du genre... ?
Tu nous aurais mis le titre du livre qu'on en serait pas mort. :-)
"Cambodge année zéro" ? Rien que de repenser à la visite de Tuol Sleng accompagné d'un guide francophone me noue l'estomac.
Encore un moment où l'occident s'est contenté de rappatrier. Il semblerait qu'on n'ait pas envie d'apprendre de nos erreurs.
signé Merriadoc, le 31/7/06 11:13
- C'est bien Souchon. "Les Bobos", c'est le dernier single de Renaud.
- Le livre c'est : http://www.amazon.fr/gp/product/0300096496/, dans sa version française étonnament absente d'amazon (peut-être parce que la traductrice n'est ni de près ni de loin khmérophone, et recopie bêtement les translittérations du Khmer vers l'anglais ?). Mais je ne le recommande qu'à des gens véritablement motivés par le sujet : c'est un bouquin d'historien, très rigoureux et exhaustif, pas vraiment "romancé" comme un ouvrage de Ponchaud ou de Becker.
- Sur l'Occident : ce n'est pas faux, mais un peu plus compliqué que ça. Le 17 avril 1975, le pays s'est totalement fermé. Plus personne n'y entrait (de très rares délégations de pays amis : Chine, Albanie...), et les seuls autorisés à sortir étaient les dignitaires du régime. Il y avait Ponchaud qui tentait (avec plus ou moins de bonheur) de comprendre ce qui se passait, et la CIA à Bangkok qui recueillait les témoignages des réfugiés et qui avait donc une bonne vue de la situation. Mais pendant au moins un ou deux ans, la situation a été très très opaque vue de l'extérieur. Mais les grands dirigeants occidentaux avaient probablement une vue suffisament claire, effectivement. Enfin, personnellement, le droit d'ingérence, je ne suis pas très convaincu.
- Tuol Sleng, ce fut la prison de la police politique du régime. Ce qui signifie qu'une majorité de ceux qui y sont passé était des membres, parfois haut placés, du PCK, et leur famille. Ce sont les victimes des purges successives (notamment la reprise en main par Pol Pot des branches plus "modérées" de l'appareil), mais fréquemment pas des victimes complètement innocentes. Ca ne diminue pas l'horreur du lieu, mais je trouve intéressant de le savoir.
signé Emmanuel, le 31/7/06 19:35
Rom, meuh non faut aller au Brésil et en Biélorussie, le Vietnam c'est plus ça. ;-) Moi par exemple, en vrai bobo, je pars ce WE au Puy en Velay !
signé Tita67, le 1/8/06 14:30
Ah pardon chère Tita, il semble que Buenos Aires (prononcé avec l'accent) soit méga-tendance. Je ne sais pas si l'Indonésie l'est toujours.... Quant au Brésil, j'ai cru comprendre que c'était has been. Je ne connais pas le Puy-en-Velay mais le nom inspire...
signé Rom, le 2/8/06 11:03
rom:
bourgeois boheme a été "forgé" par David Brooks
entre autre chroniqueur au NYT, dans son livre Bobos in Paradise
le livre peut être 'consulté" sur Amazon avec "search inside this book"
http://www.amazon.com/gp/product/0684853787/
(ce billet a été rédigé en consultant http://fr.wikipedia.org/wiki/Bourgeois-bohème )
signé 2/8/06 14:15
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